Combler les lacunes en matière de financement des soins dentaires :

Mettre sur pied un programme durable et efficace financé par le gouvernement fédéral

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Nos recommandations : Une stratégie fédérale de santé buccodentaire qui s’attaque aux obstacles non financiers à une meilleure santé buccodentaire

Une de nos principales recommandations, en plus d’un investissement fédéral dans l’accès aux soins dentaires, consiste à ce que le gouvernement fédéral élabore une stratégie de santé buccodentaire pour contrer les obstacles non financiers à l’accès aux soins. Cette approche aura un impact marqué et mesurable sur la santé buccodentaire des Canadiens les plus vulnérables. Une telle stratégie devrait être élaborée de concert avec un groupe diversifié d’intervenants et de partenaires, et devrait comprendre des mesures pour régler les enjeux suivants.

Populations vulnérables

Les besoins de soins de santé buccodentaire de tous les Canadiens doivent être pris en compte pour élaborer une stratégie de santé buccodentaire, plus particulièrement ceux des populations vulnérables ayant des besoins particuliers, entre autres les personnes autochtones, les personnes âgées et les personnes handicapées.

Même si le programme de services de santé non assurés pour les membres des Premières Nations et les Inuits admissibles fournit une assurance dentaire à près d’un million de personnes, la santé buccodentaire des Autochtones accuse un retard considérable par rapport à celle de la population générale. Cet écart démontre qu’il existe d’autres obstacles à l’accès aux soins dentaires et à une santé buccodentaire optimale pour les personnes autochtones et qu’il faudra les régler dans le cadre d’une stratégie de santé buccodentaire efficace.

De nombreuses personnes âgées au Canada sont confrontées à des obstacles financiers, physiques et géographiques au sein du système de soins de santé, y compris pour l’accès aux soins dentaires. Le revenu des Canadiens diminue progressivement avec l’âge et les personnes plus âgées sont moins susceptibles d’avoir une assurance dentaire privée dans le cadre de leur travail. L’investissement fédéral dans la couverture des soins dentaires pour les personnes âgées les aidera, mais les besoins physiques, géographiques et socioéconomiques complexes des personnes âgées devront également être pris en compte pour élaborer une stratégie de santé buccodentaire.

Certaines personnes ayant des handicaps physiques et des troubles du développement ont des besoins de soins dentaires particuliers qui ont des répercussions complexes et interreliées sur leur santé générale et leur bien-être. Dans certains cas, la prestation de soins dentaires pour les personnes handicapées nécessite de l’équipement spécialisé, l’utilisation de salles d’opération ou une formation particulière. Il est important de s’assurer que toute initiative de soins dentaires financée par le gouvernement fédéral tienne compte des besoins particuliers en matière de soins de santé buccodentaire des personnes handicapées et des nombreux obstacles auxquels elles sont confrontées.

Données et recherches sur une meilleure santé buccodentaire

Même si la santé buccodentaire est une composante essentielle de la santé globale, elle est rarement incluse dans les études à grande échelle sur la santé effectuées par le gouvernement fédéral. Depuis 2010, l’Enquête canadienne sur les mesures de la santé ne tient pas compte de la santé buccodentaire, et elle est régulièrement oubliée de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes. Il est impossible de surveiller et de faire le suivi des progrès en matière de santé buccodentaire des Canadiens sans des données régulières et fiables. La capacité de recueillir des données sur la santé buccodentaire dans les prochains cycles de l’Enquête canadienne sur les mesures de la santé et de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes sera essentielle pour évaluer l’impact des initiatives de santé buccodentaire financées par l’État, et repérer toute mesure d’adaptation nécessaire pour s’assurer qu’elles contribuent à une amélioration à long terme de la santé buccodentaire des Canadiens. Le gouvernement fédéral devrait s’engager à verser un financement continu à long terme pour s’assurer que les composantes de la santé buccodentaire sont évaluées aussi bien dans le cadre de l’Enquête canadienne sur les mesures de la santé que de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes.

Les indicateurs de santé buccodentaire dont il faut tenir compte, ainsi que les rôles des questionnaires adressés aux ménages et des examens physiques, devraient être déterminés en consultation avec les experts de la santé buccodentaire, c’est-à-dire les dentistes. L’Association dentaire canadienne a également incité le nouveau Comité permanent de la science et de la recherche de la Chambre des communes à entreprendre une étude sur la recherche et la collecte de données sur la santé buccodentaire au Canada et à formuler d’autres recommandations à l’intention du gouvernement.

Financement des organismes de santé buccodentaire

L’assurance dentaire financée par le gouvernement fédéral pourrait attirer jusqu’à 7 à 9 millions de nouveaux patients dans les cabinets dentaires au cours des prochaines années. Cette augmentation exigera que les organismes de santé buccodentaire du Canada accroissent significativement leurs activités relatives à la promotion de la santé buccodentaire et au soutien professionnel pour leurs membres. Au cours des prochains mois et des prochaines années, ils devront se réinventer et adapter leurs activités pour appuyer aussi bien les patients que les fournisseurs. Ces mesures pourraient comprendre la sensibilisation aux nouvelles initiatives fédérales de soins dentaires, des campagnes d’éducation du public sur l’importance de la santé buccodentaire pour la santé globale, la réponse aux questions de professionnels de la santé buccodentaire, et la fourniture de conseils d’experts et de suggestions au gouvernement fédéral pour le développement et la mise en œuvre de futures propositions relatives à la santé buccodentaire. Pour y arriver, et dans le cadre d’une stratégie de santé buccodentaire plus vaste, le gouvernement fédéral devrait offrir du soutien financier aux organismes de santé buccodentaire qui choisissent de participer à ces activités, pour absorber une partie des coûts. Cela pourrait commencer dès le budget 2023.

Régler les problèmes de personnel de soins dentaires

Le système de soins de santé canadien vit actuellement une crise en matière de ressources humaines, et le secteur de la santé buccodentaire ne fait pas exception. Longtemps avant la pandémie, les dentistes se disaient déjà préoccupés par leur capacité à recruter et à conserver du personnel dans leurs cabinets, en particulier des assistants et assistantes dentaires agréés. Dans la décennie ayant précédé la pandémie, le ratio de nouveaux assistants dentaires par rapport aux nouveaux dentistes avait chuté de moitié. En 2019, un tiers des cabinets dentaires affichaient des postes vacants en assistance dentaire. Depuis, la situation s’est encore détériorée en raison des problèmes plus vastes du marché du travail résultant de la pandémie de COVID-19.

Il sera donc essentiel de s’assurer que le personnel dentaire a la capacité de répondre à l’augmentation inattendue de la demande de consultations résultant de l’assurance dentaire financée par le gouvernement fédéral. Cette main-d’œuvre est déjà surexploitée, en particulier dans les régions rurales, où il existe une pénurie de travailleurs dans le domaine de la santé buccodentaire, y compris de dentistes. Un récent sondage d’opinion publique effectué pour l’Association dentaire canadienne a également révélé une proportion croissante de rendez-vous annulés et une augmentation du temps d’attente pour les patients causée par les problèmes de dotation en personnel des cabinets dentaires. L’Association dentaire canadienne recommande que le gouvernement fédéral s’attaque spécifiquement aux problèmes de ressources humaines et à la pénurie de main-d’œuvre dans le secteur de la santé buccodentaire. Cela contribuera à faire en sorte que les patients ne soient pas confrontés à des temps d’attente accrus pour consulter des fournisseurs de soins dentaires. Ces enjeux ne comprennent pas simplement le recrutement et la rétention d’un plus grand nombre d’assistants dentaires et d’autres employés. Ils comprennent par exemple :

  • Fournir une formation en santé mentale et bien-être à tout le personnel des cabinets dentaires.
  • Améliorer les compétences en gestion des ressources humaines du personnel des cabinets dentaires.
  • Profiter des nouvelles technologies numériques pour élargir l’accès à des programmes de formation d’assistants dentaires agréés.
  • Augmenter la mobilité de la main-d’œuvre entre les territoires de compétence.
  • Miser sur le potentiel de la population croissante d’immigrants au Canada.

Même si le nombre de dentistes au Canada est suffisant et en croissance, des efforts doivent être déployés pour s’assurer que les équipes dirigées par des dentistes puissent répondre aux besoins des patients de tous les groupes démographiques, dans toutes les régions du Canada. Le gouvernement fédéral a déjà réalisé des progrès intéressants en s’engageant à élargir l’admissibilité au programme d’Exonération de remboursement du prêt d’études. Étant donné qu’au Canada, le coût des études en dentisterie est plus élevé que le coût des études pour toutes les autres professions de la santé comparables, une exonération de remboursement des prêts par le gouvernement fédéral pourrait inciter les dentistes nouvellement diplômés à travailler dans des régions rurales, éloignées et dans le Nord, et contribuer ainsi à régler certains enjeux géographiques à la prestation de soins dentaires au Canada. Des efforts sont également requis pour s’assurer que le personnel de soins dentaires dans l’ensemble du pays possède les connaissances et l’expertise nécessaires pour fournir à tous les patients les soins dont ils ont besoin – particulièrement à ceux ayant des besoins particuliers, comme les enfants, les personnes âgées, les personnes handicapées, etc. Pour ce faire, le gouvernement fédéral pourrait collaborer avec l’Association des facultés dentaires du Canada ainsi qu’avec les écoles membres, par exemple pour l’élaboration des programmes ou la conception de modules de formation continue sur la façon de traiter ces populations.