• George K.B. Sàndor, MD, DDS,
FRCD(C), FRCS(C), FACS •
L’article est affiché au complet en anglais sur le site
Web de l’eJADC à : http://www.cda-adc.ca/jadc/vol-67/issue10/594.html
Mots clés MeSH : craniofacial abnormalities/genetics; human; genome;
mutation
© J Can Dent Assoc 2001; 67(10):594-9
La modification accidentelle de l’ADN est le fondement de nombreuses maladies. Les mutations génétiques, c’est-à-dire les modifications du génome d’une personne, peuvent être héréditaires et toucher des cellules qui se divisent perpétuellement (mutation des cellules germinales) ou survenir à un moment quelconque de la vie de cette personne (mutations somatiques). Certaines mutations ont des effets très divers allant de l’absence ou de l’altération de la synthèse des protéines ou des tissus à des changements structuraux. Pour comprendre ces modifications, il est nécessaire de connaître le code génétique de base. La tentative la mieux connue et la plus importante de déchiffrer le code génétique humain est le Projet du génome humain ( www.nhgri.nih.gov ).
On nomme ainsi les efforts entrepris avec l’aide de fonds gouvernementaux en vue d’établir la carte du génome humain dans ses détails moléculaires1. Ce projet ambitieux devait se terminer en 2003. Dès avril 2000, Francis Collins, directeur du Projet du génome humain, annonçait qu’on avait établi la séquence des 2/3 du code génétique humain2. Le projet a toutefois suscité un tel intérêt que la société privée Celera Genomics est maintenant entrée dans la course à l’établissement de la carte du génome humain. En 2001, Celera annonçait qu’elle avait décodé 99 % des gènes humains3. Les enjeux sont considérables et ils incluent l’obtention de brevets concernant l’information génétique humaine, particulièrement importante pour l’industrie pharmaceutique2.
L’étendue de l’information génétique humaine est immense. En effet, le génome humain contient à peu près 3 milliards de nucléotides, représentant environ 100 000 allèles contenus dans 46 chromosomes. La transcription de ces chromosomes révèle l’information nécessaire à la synthèse d’environ 6000 protéines. Ces protéines forment les billions de cellules à la base des quelque 4000 structures anatomiques qui constituent l’être humain4. La mutation du génome, c’est-à-dire sa modification accidentelle, peut causer des affections ou des syndromes héréditaires touchant différents aspects de la croissance et du développement.
Les syndromes héréditaires dont il sera question dans le présent article représentent seulement une partie des anomalies que le dentiste peut rencontrer. En plus de décrire chaque syndrome, l’article examine l’hérédité génétique connue et les mutations responsables du syndrome. Même si certains syndromes comportent aussi d’autres caractéristiques cliniques ou radiographiques, nous nous limiterons ici à diverses ano malies de la tête et du cou. Le tableau 1 résume les syndromes examinés. Vu le développement rapide de la génétique, on s’attend à une évolution et à un élargissement constants des connaissances.
Amélogenèse hypoplasique imparfaite
Dysplasie cléïdo-crânienne
Fissure labiale non syndromique avec ou sans fissure palatine
Dentinogenèse imparfaite
La dentinogenèse imparfaite est héréditaire à caractère autosomique dominant. Roulston et autres18 ont conclu que la dentinogenèse imparfaite de type I se situe sur le chromosome 4, à la position q13-q21.
Ostéopétrose
L’hérédité de l’ostéopétrose est principalement récessive autosomique, même s’il existe des formes légères dominantes autosomiques. On ne connaît pas l’emplacement exact du gène responsable de cette affection. Toutefois, Coccia et autres19 ont transplanté de la moëlle osseuse d’un enfant non touché sur un frère ou une sœur présentant une ostéopétrose maligne. Chez l’enfant affecté, l’ostéopétrose a été fortement atténuée par le transfert d’ostéoclastes liés à l’Y et par la restauration de la fonction monocyte-macrophage antérieurement défectueuse.
Dysostose mandibulo-faciale
La dysostose mandibulo-faciale est une affection héréditaire de gravité variable à caractère dominant autosomique. L’allèle, également nommé «gène de Treacle», peut résulter d’une translocation équilibrée20.
Hypodontie
Selon la plupart des chercheurs, l’hypodontie résulte d’un seul gène dominant21. En se fondant sur 2 modèles à seuils multiples, Suarez et Spence22 ont toutefois montré que les données sur l’hypodontie répondent mieux à un modèle polygénique qu’à un modèle reposant sur un seul gène prin cipal, ce qui sous-entend que l’affection est causée à la fois par des facteurs environnementaux et génétiques. On n’a pas encore découvert l’emplacement du gène responsable de l’oligodontie ou de l’hypodontie.
Naevomatose baso-cellulaire
Conclusions
La thérapie génique et le génie génétique en sont encore à leurs débuts et il leur reste bien des obstacles à surmonter. Parmi les caractéristiques communes aux affections examinées dans le présent article figurent leur faible prévalence et la complexité de repérer avec précision le gène défectueux.
Malgré les progrès continus et remarquables effectués dans ces domaines, on doit se rappeler que la majeure partie des travaux ont porté sur des modèles animaux et que la connaissance de la génétique humaine présente encore de nombreuses lacunes. La modification permanente de la constitution génétique des individus suscite par ailleurs d’importantes préoccupations sur le plan de l’éthique. Il importera à l’avenir de perfectionner les techniques employées en nanotechnologie28,29 et de débattre des questions philosophiques pertinentes afin de les concilier.
Le Dr Sàndor est coordonnateur de chirurgie buccale et maxillo-faciale à l’Hôpital des enfants et au Centre pour enfants Bloorview MacMillan à Toronto (Ont.) et directeur du programme de formation de cycle supérieur en chirurgie buccale et maxillo-faciale à l’Hôpital général de Toronto, et professeur adjoint à la Faculté de médecine dentaire, Université de Toronto.
Le Dr Carmichael est coordonnateur du service de prosthodontie à l’Hôpital des enfants et au Centre pour enfants Bloorview MacMillan à Toronto (Ont.); il est aussi professeur agrégé à la Faculté de médecine dentaire de l’Université de Toronto.
Le Dr Coraza a été interne dentaire à l’Hôpital général de Toronto.
Le Dr Clokie est professeur agrégé et chef du service de chirurgie buccale et maxillo-faciale à l’Université de Toronto et l’Hôpital général de Toronto; il est aussi directeur du Groupe de recherche en orthobiologie, chirurgie buccale et maxillo-faciale, à l’Université de Toronto.
Le Dr Jordan est professeur agrégé de pathologie buccale et de pathologie à la Faculté de médecine dentaire et de médecine de l’University of California à San Francisco (Californie).
Écrire au : Dr George K.B. Sàndor, Hôpital des enfants, S527-555, av. University, Toronto ON M5G 1X8. Courriel: gsandor@sickkids.ca.
Les auteurs n’ont aucun intérêt financier déclaré dans la ou les sociétés qui fabriquent les produits mentionnés dans cet article.
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Le Centre de documentation peut effectuer des recherches et faire des copies d’articles sur MEDLINE en matière de syndromes discutés dans cet article. Les membres de l’ADC peuvent communiquer avec le Centre de documentation; tél. : 1-800-267-6354 ou (613) 523-1770, poste 2223; téléc. : (613) 523-6574; courriel : info@cda-adc.ca .