Volume 8 • 2021 • Numéro 5

leur nom, leur adresse électronique ou toute autre information qui permettrait de les identifier. D’ailleurs, tout signalement est passé en revue pour garantir son anonymat. L’appli préserve l’anonymat autant des patients que des fournisseurs de soins. « Ce n’est pas comme ces sites d’évaluation qui ternissent la réputation de personnes ciblées, précise le Dr Lafontaine. Notre programme pilote en Colombie-Britannique a montré que 20 % des signalements provenaient de l’intérieur du réseau de la santé. Les médecins, infirmières, administrateurs et autres travailleurs de la santé ont senti qu’ils pouvaient dénoncer les préjudices et utiliser eux aussi l’appli. » Le Dr Lafontaine estime que la protection et l’autonomisation de toutes les parties prenantes d’une affaire constituent la meilleure façon de travailler en faveur de changements positifs. « Il n’est pas nécessaire de connaître le nom du médecin ou du patient pour améliorer les choses », explique le Dr Lafontaine. Il souligne que le retrait d’une personne d’un lieu de travail ne résoudra pas le racisme systémique. L’objectif consiste plutôt à contribuer à la création d’un réseau de la santé apprenant, capable de faire plus que simplement réagir aux expériences négatives et aux préjudices en matière de santé. « Un réseau de la santé apprenant efficace peut faire en sorte qu’il n’y ait pas de telles situations tout court », fait-il valoir. Expérience utilisateur Si un patient autochtone risque le tout pour le tout et dépose une plainte officielle à cause d’un préjudice lié à des soins médicaux, il n’en aura probablement plus de nouvelles. Si une enquête est ouverte, il en entendra rarement parler et recevra peu de nouvelles en temps réel. Quand une décision sera rendue, qu’elle soit favorable ou non, le patient ne saura pas qui l’a prononcée. Toute la démarche pourrait le tenir à l’écart. L’appli SafeSpace donne accès à davantage d’informations sur les établissements de santé. « Supposons que vous êtes un patient, dit le Dr Lafontaine. Vous avez vécu un préjudice et vous utilisez l’appli pour le signaler. Automatiquement, vous recevez des données. Par exemple, il se pourrait que cinq autres personnes aient vécu une expérience semblable dans le même établissement. Lorsqu’une tendance se profile, il est possible d’intervenir. » Voyez l’entrevue en entier avec le Dr Lafontaine dans CDA Oasis à : bit.ly/2UHgROD [en anglais] LeDr Lafontaineestimeque laprotection et l’autonomisation de toutes les parties prenantes d’une affaire constituent la meilleure façon de travailler en faveur de changements positifs. Avec l’appli SafeSpace, les patients et les professionnels de la santé arrivent à dégager des tendances. « Nous utilisons les tendances avérées pour aider les patients autochtones à faire des choix éclairés sur les soins auxquels ils veulent accéder et pour aider le réseau de la santé à prendre de bonnes décisions sur la conception des systèmes », précise le Dr Lafontaine. Conjuguer médecine dentaire et conception de logiciels Le Dr Lafontaine estime que la profession dentaire offre assez de souplesse aux dentistes pour s’intéresser à plus d’une chose. Il travaille à temps partiel dans son cabinet dentaire et consacre les autres journées à sa compagnie informatique. « Certaines personnes aiment le golf, d’autres les voitures de collection, signale-t-il. Mon frère et moi nous intéressons à la création de technologies qui peuvent résoudre des problèmes concrets. » Avec l’appli SafeSpace, le Dr Lafontaine espère démocratiser les signalements. « Les vrais problèmes surviennent en aval, quand il y a un monopole de la vérité, quand une seule version des faits est racontée, ajoute-t-il. Je crois que la société est en train de découvrir que la pluralité des voix et les technologies qui permettent de les entendre peuvent être des outils au service de la justice. » (De g. à d.) Le Dr Kamea Aloha Lafontaine et son frère, le Dr Alika Lafontaine, président désigné de l’Association médicale canadienne 23 Numéro 5 | 2021 | Point de mire