Programmes et politiques de désaccoutumance au tabac à la Faculté de médecine dentaire de l’Université du Manitoba

À la lumière de cette constatation, la Faculté de médecine dentaire de l’Université du Manitoba a intégré à son programme d’études, à l’automne 1998, un certain nombre d’initiatives favorisant la désaccoutumance au tabac. Elles se résument comme suit :

1. intégration d’une formation officielle en désaccoutumance au tabac aux programmes de de médecine dentaire et d’hygiène dentaire;

2. élaboration d’un protocole clinique systématique sur la désaccoutumance au tabac pour la clinique de formation générale;

3. mise en oeuvre d’un programme de renvoi aux cliniques de désaccoutumance au tabac de la Faculté;

4. création d’un centre de documentation offrant aux dentistes des documents éducatifs sur la désaccoutumance au tabac et des moyens d’instaurer un programme individuel de désaccoutumance au tabac dans leur cabinet;

5. mise sur pied d’un programme de formation continue intitulé «Comment aider vos patients à renoncer au tabac»;

6. évaluation de l’efficacité de l’ensemble de ces initiatives et de leur impact sur l’utilisation des services de désaccoutumance au tabac offerts par les étudiants dans le cadre de la clinique de formation générale.

Programme de premier cycle

Le Comité du programme de médecine dentaire a consenti à ce que le programme offert en 1998 comporte une formation en désaccoutumance au tabac. Dans le cours d’introduction aux soins de santé intégrés, qui se donne en deuxième année, les étudiants en médecine dentaire prennent part à un atelier de formation de 3 heures en compagnie des étudiants de première année en hygiène dentaire. Le but est de faire en sorte que tous les cliniciens possèdent les connaissances et les compétences néces saires afin d’être aptes et prêts à fournir des conseils rigoureusement scientifiques en matière de désaccoutumance au tabac. (Dans la première année du programme, il a fallu former tous les étudiants de deuxième, troisième et quatrième années en médecine dentaire, ainsi que les étudiants de première et deuxième années en hygiène dentaire.)

Objectifs de l’atelier

Au terme de la formation, l’étudiant :

• comprendra l’impact du tabagisme sur la santé en général et la santé bucco-dentaire;

• connaîtra les principes fondamentaux de l’action biologique du tabagisme sur la santé bucco-dentaire;

• connaîtra les facteurs physiques, psychologiques et sociaux associés au tabagisme;

• pourra expliquer le rôle des professionnels dentaires dans la désaccoutumance au tabac;

• saura ce qu’est le principe des «phases du changement» et l’utilisera pour conseiller ses patients;

• comprendra le rôle que jouent les traitements pharmacologiques, dont la thérapie de remplacement de la nicotine (timbre et gomme) et le buproprion HCl (Zyban);

• connaîtra les mécanismes de renvoi à des ressources communautaires offrant des services de consultation intensive, individuelle ou en groupe, aux personnes qui désirent cesser de fumer;

• sera apte à appliquer le protocole clinique établi par la Faculté en matière de désaccoutumance au tabac;

• sera apte à concevoir et à mettre en oeuvre un programme de désaccoutumance au tabac au sein du cabinet dentaire qu’il dirigera.

Contenu de l’atelier

L’atelier traite des sujets suivants :

• la prévalence du tabagisme et les coûts directs et indirects des soins de santé publique;

• les conséquences du tabagisme sur la santé en général;

• les conséquences du tabagisme sur la santé bucco-dentaire;

• les raisons qui motivent les gens à fumer et à cesser de fumer;

• la dépendance à la nicotine, en quoi elle consiste, quels en sont les effets physiques, le sevrage;

• le principe des phases du changement et la réceptivité au processus de désaccoutumance;

• la consultation (questionner, conseiller, aider, conclure des arrangements), matériel de désaccoutumance à l’intention des fumeurs, concepts de renvoi;

• traitements pharmacologiques, thérapie de remplacement de la nicotine ou non, indications/contre-indications;

• protocole clinique de la Faculté — programme de désaccoutumance au tabac;

• formation pratique en désaccoutumance au tabac à l’intention du cabinet dentaire.

Évaluation de l’atelier

Les étudiants ont été évalués avant et après l’atelier. Les résultats ont révélé que l’atelier leur a permis de mieux comprendre ce qu’est le tabac et quels en sont les effets sur la santé en général et la santé bucco-dentaire, en quoi consiste la dépendance à la nicotine, quels sont les facteurs physiques, psychologiques et sociaux associés au sevrage, les phases du changement lors du sevrage et le rôle qu’ils ont à jouer auprès de leurs patients en tentant de les conseiller et de les aider à cesser de fumer.

Protocole de la Faculté concernant la clinique de formation

La prestation de services de désaccoutumance au tabac est pratique courante chez les cliniciens¹⁴. Dans un document intitulé Smoking Cessation: Clinical Practice Guidelines, l’Agency for Health Policy and Research et les Centers for Disease Control and Prevention des États-Unis¹⁵ recommandent que les fournisseurs de soins de santé établissent des politiques, fournissent des ressources et fassent preuve d’initiative afin d’appuyer les efforts de chaque établissement de santé visant à promouvoir la désaccoutumance au tabac. En tant que centre de soins communautaires fournissant des soins bucco-dentaires à la population, la Faculté a mis ces recommandations à exécution en mettant sur pied un programme de désaccoutumance au tabac pour sa clinique de formation générale.

Les responsables du cours ont commencé par revoir le formulaire d’antécédents médicaux de la Faculté afin d’y ajouter des questions bien précises sur l’usage ou non du tabac chez les patients. Pendant que l’on soumet les patients à un examen buccal, on appose sur leur dossier un autocollant de couleur qui indique si le patient est non-fumeur (autocollant blanc) ou fumeur (autocollant noir). Les fournisseurs de soins se servent de cet autocollant pour donner ou non des conseils à leurs patients concernant l’usage du tabac. En raison de l’incidence du tabagisme sur l’augmentation des cas de maladie parodontale et de ses effets néfastes sur le résultat du traitement parodontal, on a aussi procédé à une révision des formulaires cliniques dont se servent les étudiants de premier cycle en parodontologie afin de recueillir plus de renseignements précis sur l’usage du tabac, comme la fréquence et la durée d’exposition au tabac et la réceptivité à la désaccoutumance. Ces formulaires permettent aux étudiants d’associer l’usage du tabac à l’apparition de la maladie parodontale chez le patient et d’intégrer des services de désaccoutumance au tabac à son traitement parodontal. Ils indiquent également le degré de réceptivité du patient à la désaccoutumance, les conseils et le matériel qui lui ont été donnés par l’étudiant pour l’aider à cesser de fumer et si on lui a recommandé de recourir à des ser vices de consultation plus intensive. À l’intérieur de la clinique de formation générale se trouve une aire expressément aménagée pour consulter des documents sur la désaccoutumance au tabac, obtenir des renseignements sur la thérapie de remplacement de la nicotine et emprunter des vidéos.

Programme de renvoi

Les patients qui assistent à la clinique de formation générale de la Faculté et qui se disent prêts à cesser de fumer reçoivent des documents éducatifs personnalisés les aidant à renoncer au tabac par eux-mêmes, ainsi que des services de consultation de la part d’un étudiant. Pour les patients qui désirent obtenir des services de consultation plus intensive, les étudiants peuvent les diriger vers les cliniques offertes par la Faculté sur la désaccoutumance au tabac. Ces cliniques proposent une approche collective s’appuyant sur la modification du comportement pour aider les gens à cesser l’usage du tabac. Les participants sont conviés à 8 séances du soir d’une durée de 2 heures chacune où ils élaborent un plan d’action personnel pour cesser de fumer. On les informe aussi sur la thé rapie de remplacement de la nicotine et autre. Le programme aborde également la gestion du stress, les techniques de relaxation, les habitudes alimentaires saines et autres changements positifs dans le mode de vie. Les participants prennent part à un «système de surveillance mutuelle». Le coût du programme est d’environ 130 $ et comprend le coût des documents, de l’assistance d’un animateur et des services de désaccoutumance au tabac fournis par une infirmière embauchée sur une base contractuelle par la Faculté et formée par l’Association pulmonaire du Manitoba. Les séances s’échelonnent sur un an et ont lieu dans une salle de séminaire de la Faculté. Les dentistes exerçant dans la province peuvent également diriger leurs patients vers les cliniques de la Faculté. De nombreux patients internes et externes ont pris part au programme au cours des 2 dernières années sur recommandation de leur dentiste.

Le Dr Gelskey fournit de la documentation sur la désaccoutumance au tabac lors de l’assemblée annuelle de l’Association dentaire du Manitoba en janvier 2001.

Centre de documentation

La Faculté est en quelque sorte un centre de documentation auprès des professionnels de la santé bucco-dentaire de la province qui cherchent des documents éducatifs pour aider leurs patients à renoncer au tabac par eux-mêmes ou des ouvrages scientifiques portant sur le tabac et la santé bucco-dentaire. La Faculté offre également des services de consultation directe aux praticiens qui veulent savoir comment instaurer un programme de désaccoutumance au tabac dans un cabinet dentaire.

Formation continue

En août 1998, la Faculté a lancé son programme de désaccoutumance au tabac dans le cadre d’une conférence de 2 jours inti tulée «Comment aider vos patients à renoncer au tabac». Le D^r Robert Mecklenberg du National Cancer Institute des États-Unis était le conférencier. Plus de 350 professionnels de la santé, dont des médecins, des dentistes, des infirmières, des hygiénistes et des assistantes dentaires, des pharmaciens et des inhalothérapeutes, y étaient présents. La Faculté prévoit offrir un autre cours de formation continue sur la désaccoutumance au tabac au printemps 2001.

Évaluation des initiatives de la Faculté

Avant la mise sur pied des initiatives de la Faculté en matière de désaccoutumance au tabac, on a procédé à une évaluation de base de l’utilisation des services de consultation fournis par les étudiants et le personnel. On a examiné les dossiers de tous les adultes ayant consulté la clinique dentaire durant l’année scolaire 1997-1998 et identifié chaque fumeur et non-fumeur. On a communiqué avec les fumeurs et on leur a demandé, dans le cadre d’une entrevue téléphonique dirigée, s’ils avaient été informés, lors de la clinique de la Faculté, des conséquences possibles du tabagisme sur la santé bucco-dentaire et si on leur avait conseillé d’arrêter de fumer. À l’automne 1998, suite à cette évaluation, la Faculté a mis sur pied ses initiatives anti-tabac. Pour savoir si les services de consultation ont connu une hausse suite à ces initiatives, on a examiné les dossiers de tous les adultes ayant consulté la clinique dentaire durant l’année scolaire 1999-2000 et identifié chaque fumeur et non-fumeur. On a ensuite procédé aux mêmes entrevues téléphoniques. Les données recueillies sont actuellement à l’étude et seront publiées avec les résultats de l’évaluation de base.

Points à examiner

En 1999, la Faculté a soumis une proposition à l’Association dentaire du Manitoba (ADM), dans laquelle elle demande la création d’un code régissant les honoraires de services de désaccoutumance au tabac. La proposition a été approuvée par l’ADM, puis soumise à l’Association dentaire canadienne pour examen. L’ADC vient de procéder au lancement de ce code, qui fait maintenant partie du guide d’honoraires de l’ADM.

La Faculté a également obtenu l’approbation de l’ADM, du Collège des médecins et chirurgiens du Manitoba et de l’Association des pharmaciens du Manitoba pour permettre aux dentistes ayant terminé avec succès un programme de formation reconnu en désaccoutumance au tabac de prescrire du buproprion HCl (Zyban) à leurs patients afin de les aider à cesser de fumer. Les dentistes qui prescrivent du Zyban pourront le faire avec le consentement du médecin du patient, qui est celui qui connaît le mieux l’état de santé général du patient.

Le D^r Gelskey est professeure agrégée et directrice du Département du diagnostic dentaire et des sciences chirugicales de la Faculté de médecine dentaire, Université du Manitoba.

Écrire au : D^r Shirley C. Gelskey, Département du diagnostic dentaire et des sciences chirurgicales, Faculté de médecine dentaire, Université du Manitoba, 780, av. Bannatyne, Winnipeg, MB R3E 0W2. Courriel : shirley_gelskey@umanitoba.ca.

L’auteure n’a aucun intérêt financier déclaré. Les vues exprimées sont celles de l’auteure et ne reflètent pas nécessairement les opinions et les politiques officielles de l’Association dentaire canadienne.

Références

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