Volume 12 • 2025 • Numéro 4

Même si mon expérience est éminemment personnelle, elle fait ressortir quelque chose de beaucoup plus grand que nous ne pouvons pas ignorer en tant que profession : l’évolution de la relation entre la médecine dentaire et le monde numérique. L’incident Au début de 2024, environ trois mois après mon retour au travail à temps partiel après un long congé de maladie, j’essayais encore de retrouver ma place – du point de vue émotionnel, mental et professionnel. Le monde me semblait particulièrement lourd : j’étais aux prises avec des défis personnels, je venais de terminer un parcours médical, et je vivais en temps réel toutes les difficiles émotions de la guerre qui faisait rage dans la bande de Gaza. C’était une période de vulnérabilité, tant sur le plan privé que mondial, et comme beaucoup d’autres, j’ai eu du mal à digérer tout ce qui se passait. Durant cette période de fragilité, j’ai commis une erreur. Sur un compte Instagram privé – qui s’adressait seulement à un petit cercle d’amis et de collègues –, j’ai publié des pensées qui, même si elles n’avaient pas été destinées à un vaste auditoire, ont fini par être prises hors contexte, grossies et instrumentalisées sur la place publique. Comme c’est souvent le cas, Internet a été sans merci. Ce qui était privé était maintenant public et, tout à coup, ma carrière, ma réputation et même mon identité étaient la cible d’attaques. que nos patients s’en remettent à nous pour leur santé, nous font confiance et nous confient souvent leurs plus grandes craintes. Je le comprends et je l’accepte. Nous devons toujours chercher la perfection dans notre travail. Or, à l’extérieur de la salle de traitement, nous sommes humains. Nous ne sommes pas à l’abri des vagues de chagrin, de colère, d’espoir et de peur qui déferlent sur le monde. Lorsque des événements mondiaux touchent nos vies, ils se répercutent inévitablement sur notre état émotionnel, même si nos blouses blanches suggèrent le contraire. La recherche de l’excellence clinique ne doit pas nous obliger à nier notre humanité. Les médias sociaux ont créé des possibilités de développement professionnel jamais vues : partager des innovations, échanger avec des collègues, bâtir des marques avec authenticité. Mais ces médias comportent aussi des risques inédits. Dans des espaces de consommation rapide et d’indignation encore plus rapide, la nuance se perd souvent. Le contexte s’évapore. L’humanité du professionnel derrière l’écran peut être oubliée en un instant. Il faut que les gens puissent s’identifier à nous, mais nous sommes punis pour être faillibles. Il faut être authentiques, mais on nous dénonce si cette authenticité ne correspond pas aux attentes changeantes de la société. Il est épuisant de se tenir sur cette corde raide – à tel point que de nombreux professionnels ressentent de l’isolement, de l’anxiété et de la peur à l’idée de se montrer vulnérables. Si l’on attend des professionnels qu’ils soient imperméables à ce qui se passe dans le monde, nous risquons de nourrir une culture qui valorise les apparences au détriment de l’authenticité. Ce n’est pas une faiblesse que d’être affectés par ce qui se passe autour de nous – cela fait tout simplement partie de notre côté humain. Pour ma sécurité et ma tranquillité d’esprit, j’ai pris la difficile décision de changer de nom – non pour me cacher, mais pour survivre. Ce faisant, je reprenais mon identité : je suis revenue au nom de ma naissance, un nom arabe que j’avais enfoui bien loin dans un effort d’assimilation. Ce qui était autrefois un bouclier d’invisibilité est devenu, ironiquement, une source de force tranquille et d’authenticité. Avec cette histoire, je ne cherche pas à m’apitoyer ou à présenter des excuses. Cette histoire en est plutôt une de résilience, de croissance et de compréhension de l’intersection complexe entre le côté humain personnel et la responsabilité professionnelle à l’ère numérique. Une vue d’ensemble Même si mon expérience est éminemment personnelle, elle fait ressortir quelque chose de beaucoup plus grand que nous ne pouvons pas ignorer en tant que profession : l’évolution de la relation entre la médecine dentaire et le monde numérique. La médecine dentaire demande que nous visions la perfection – pour la précision, les soins et l’excellence – parce 21 Numéro 4 | 2025 | Point de mire

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